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Extrait du dialogue entre «un Japonais« et «un qui demande»:
J. Iki, c’est le vent de la silencieuse paix du ravissement resplendissant.
D. Le ravissement vous le prenez au mot, l’entendant comme une échappée qui transporte, comme l’arrachée qui porte au cœur de la calme paix du silence.
J. Nulle part, là, d’attrait ni d’impression.
D. Le ravissement qui transporte est comme faire-signe au loin, un faire signe qui invite à partir ou invite à venir.
J. Mais le faire-signe est l’annonce que dit le voile qui couvre tandis qu’il éclaircit.
D. Ainsi, toute venue en présence aurait sa provenance dans la grâce, entendue comme pur ravissement de la silencieuse paix et de son appel.
J. Comme vous me prêtez l’oreille, où plutôt comme vous écoutez les conjectures allusives qui me viennent, il s’éveille en moi un sentiment de confiance qui m’engage à laisser là l’hésitation qui me retenait de répondre à votre question.
D. Vous voulez dire la question : quel mot, en japonais, parle pour cela que, nous autres Européens, nommons « parole ».
J. Ce mot, j’avais pudeur, jusqu’à cet instant, à le dire, parce que je dois donner une traduction dans laquelle notre mot, pour « parole », va avoir l’air d’une simple transcription d’images, va sembler être un idéogramme, si la référence est le champ de la représentation et ses concepts ; car c’est bien à l’aide des seuls concepts que la science européenne et sa philosophie cherchent à saisir le déploiement de la parole.
D. Le mot japonais pour « parole », comment dit-il?
J. (après avoir encore hésité) Il dit: Koto ba[1].
D. Et cela veut dire?
J. Ba nomme les feuilles, mais aussi et en même temps les pétales. Pensez aux fleurs de cerisier et aux fleurs de prunier.
D. Et que veut dire Koto?
J. Répondre à cette question, voilà qui est suprêmement difficile. Pourtant, ce qui en facilite la tentative, c’est que nous avons osé préciser et situer l’Iki: le pur ravissement de la paix du silence en son appel. Or, le souffle, le vent de cette paix qui mène à soi et approprie ce ravissement et son appel, c’est: ce qui gouverne la venue de ce ravissement. Mais Koto nomme toujours aussi ce qui chaque fois ravit, donc le ravissement lui-même, venant rayonner, unique dans l’instant qui ne se répète jamais, avec la plénitude persuasive de la grâce.
D. Koto serait alors l’appropriement de l’éclaircissante annonce de la grâce.
[1] 言葉。
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